Simon Delétang, directeur du Théâtre de Lorient : “Le Misanthrope m'accompagne depuis très longtemps”
Du 9 au 15 octobre, on pourra découvrir au Théâtre de Lorient votre dernière création en tant que metteur en scène avec Le Misanthrope de Molière.
Comment choisit-on de reprendre un monument du répertoire classique français ?
Je n’ai pas choisi de monter un classique, j’ai choisi de jouer Le Misanthrope. Cette pièce de Molière, avec son duo Célimène et Alceste, m’accompagne depuis très longtemps. Je viens de la culture du théâtre classique. J’ai joué des pièces en alexandrins. J’ai appris Le Misanthrope au lycée dans le cadre de mon option théâtre. J’ai même eu l’occasion de le lire devant les autres élèves durant un voyage de classe. C’est d’ailleurs depuis ce jour que j’ai voulu faire du théâtre un métier. J’ai aussi eu l’opportunité de jouer en tant que comédien le personnage d’Alceste quand j’étudiais à Lyon à l’ENSATT (École nationale supérieure des Arts et Techniques du Théâtre : NDLR). J’ai repris également ce rôle en Allemagne lors d’une expérience avec des acteurs allemands et français.
Pourquoi avoir choisi un classique pour ouvrir la nouvelle saison du Centre dramatique national dont vous êtes le directeur ?
À l’origine, je voulais présenter une création avec la romancière Leïla Slimani. Mais cela n’a pas pu se faire à cette date. Depuis ma prise de fonction en tant que directeur du Théâtre de Lorient en 2023, je souhaite accorder de la place aux grands classiques. La saison dernière, le public s’est d’ailleurs montré au rendez-vous. Avec Le Misanthrope, j’ai l’occasion d’ouvrir la saison avec une pièce qui respecte le texte en alexandrins. Je vais juste y apporter un ton vif et mordant. J’ai souhaité créer des personnages qui sont toujours d’actualité avec ce jeu de cour et cet esprit carriériste si bien bien décrits par Molière.
Quelle représentation faites-vous d’Alceste et de Célimène ?
Alceste et Célimène sont deux personnages que je raccroche au monde contemporain. Je défends la sincérité d’Alceste, mais je condamne aussi son emprise sur Célimène. Je veux démontrer que Célimène a raison de refuser la posture d’un homme plus âgé qu’elle qui veut lui imposer son amour. Dans ma création du Misanthrope, Alceste est relégué en personnage du passé.
Contrairement par exemple à La Mort de Danton ou Hamlet que vous avez aussi mises en scène, Le Misanthrope est-elle une pièce plus accessible ?
Pour La Mort de Danton de Büchner, il faut bien connaître la période révolutionnaire de la Terreur. Hamlet de Shakespeare est pointu à appréhender. Le Misanthrope de Molière demeure beaucoup plus abordable pour le grand public. Il y a même des passages assez drôles. Pour autant, ’ai opté pour une scénographie qui amène les spectateurs à se poser des questions. J’aime bien quand le public est actif.
« Ce sera très surprenant avec un final qui devrait provoquer quelque chose dans la salle »
Simon Delétang à propos de sa pièce Le Misanthrope
Vous êtes un metteur en scène très soucieux de la scénographie. Faut-il s’attendre à un effet waouh au niveau du décor ?
Il y aura même plusieurs effets waouh. Je commencerai par un rideau fermé. Je peux juste dire que ce sera très surprenant avec un final qui devrait provoquer quelque chose dans la salle.
Est-il plus difficile de reprendre un auteur classique qu’un auteur contemporain ?
Sincèrement, non ! J’ai beaucoup mis en scène des textes que j’étais le premier à jouer. C’est un poids énorme sur les épaules. Pour des textes connus comme Le Misanthrope, la moitié du chemin est fait. Une bonne partie des spectateurs se déplacent pour le nom de la pièce et pour son auteur. La distribution et les comédiens constituent l’autre part du succès. Mon travail en tant que metteur en scène représente, disons 5 % de la réussite d’une grande œuvre classique.
Propos recueillis par BMO
LE MISANTHROPE
MER 09, JEU 10, VEN 11 et MAR 15 OCT – 20H
Salle Marie Dorval – Théâtre de LORIENT